Quelle entreprise n’a pas proclamé haut et fort le concept de « valorisation des données » dans son plan stratégique ? Quel que soit le secteur (énergie, transport, banque, assurance…), c’est le mot d’ordre. Mieux considérer les données devient un impératif. Les négliger, c’est prendre le risque de perdre en compétitivité à l’heure du digital.
Valoriser ses données en s’insérant dans un nouvel écosystème digital
Valoriser ses données, c’est avant toute autre chose en extraire le potentiel pour répondre aux enjeux métiers de l’entreprise.
De façon plus détaillée, quatre leviers de développement majeurs pour optimiser l’activité de l’entreprise ou étendre son business model émergent autour de la valorisation de la donnée :
- Performance opérationnelle : comment optimiser les processus internes grâce à une meilleure connaissance du temps passé par l’organisation sur chacune de ses activités ? Une démarche qui doit tenir compte des nouvelles capacités à digitaliser, c’est-à-dire à automatiser tout ou partie des processus.
- Personnalisation de la relation client : comment détecter les signaux faibles, ceux qui permettront de déterminer par exemple les populations nécessitant une attention renforcée de la part des conseillers-clientèle ?
- Développement de nouveaux services : comment adapter les offres et services grâce à une meilleure connaissance du taux de pénétration, grâce aux données sur l’équipement, l’historique de consommation ?
- Monétisation de l’information : comment faire évoluer son business model afin de proposer des services basés sur l’information-client détenue par son entreprise ?
Si mieux considérer ses données se traduit avant tout par le fait de valoriser son propre patrimoine informationnel, cela ne saurait suffire. A l’heure du digital, il est indispensable d’anticiper la concurrence des nouveaux acteurs en s’adaptant très rapidement à ce nouvel écosystème.
Dans le domaine bancaire, tout particulièrement, les données personnelles constituent un nouvel eldorado. En effet, la différenciation entre les acteurs de la place bancaires, ou leurs récents concurrents, ne sera pas liée aux données de gestion reliant un client et sa banque, mais bien à la collecte et à l’utilisation des données personnelles.
L’avantage concurrentiel sera d’autant plus fort que la banque parviendra à capter en amont les événements clients dits « exogènes », c’est-à-dire ceux qui surviennent en dehors de la relation entre le client et sa banque.
Passer d’une logique de fournisseur de services à une logique de fournisseur de données
Afin d’atteindre cet objectif, quelques points d’attention sont à prendre en compte de façon impérative :
- Déterminer son positionnement dans la chaine de la valeur de la donnée
En effet, plusieurs typologies de données existent :
- Données first party : donnée collectée directement par une entreprise sur ses actifs.
- Données second party : il données collectées par un partenaire de l’entreprise (soit les données first party de ce partenaire) dans le cadre d’un acte commercial qui les lie.
- Données third party : i données tiers anonymisées. Aujourd’hui, s’il s’agit d’un marché détenu par des acteurs spécialisés tels que Weborama, Datalogix, les entreprises possédant de la donnée-client pourraient demain se positionner de la même façon.
- Privilégier une relation de confiance avec le client
En effet, il serait vain de tenter d’obtenir un nombre toujours plus grand de données, sans bénéfice pour le client. Les informations que celui-ci fournit doivent permettre de faciliter la consommation prévue d’une offre ou d’un service. Si le client en profession libérale met à disposition de sa banque des données liées à ses horaires de travail, celles-ci pourraient être utilisées, à terme, pour personnaliser la relation client-banque, en permettant au client d’être contacté par son conseiller durant des créneaux horaires adaptés à son rythme de vie. Ainsi, plus le niveau de confiance du client augmente et plus il sera enclin à fournir des données personnelles. En aucun cas, il ne faut rompre cette relation de confiance : l’acquisition de nouvelles données devra se faire dans ce cadre.
- Maîtriser les contraintes réglementaires et sécuritaires associées notamment en termes d’hébergement et de gestion des optins/optouts
Au préalable, travailler ses données
D’un point de vue méthodologique, ce repositionnement nécessite forcément un travail préalable afin de :
- Connaître et maîtriser les données pour faciliter leur exploitation
Un état des lieux est nécessaire pour disposer d’une vision exhaustive et qualifiée des sources de données, dont il convient de mesurer la qualité.
Élaborer un modèle commun de la donnée-client vise à partager au sein de l’entreprise une représentation commune du client et des données afférentes. Attention néanmoins à ne pas omettre la notion de cycle de vie associée : prospect, client actif, inactif, archivé ou supprimée… la vision doit être partagée entre les différentes entités de l’entreprise.
- Enrichir les données, pour accroître leur pertinence
Différents types d’enrichissement sont possibles. Une amélioration de la qualité de la donnée intrinsèque permet de rendre cette dernière plus pertinente. Un ajout d’autres données internes permet de compléter la vision du client (par exemple, devis, réclamation, contact…). Enfin, un enrichissement externe augmentera la couverture des données proposées.
Bien évidemment, ces enrichissements doivent être réalisés dans le respect des règles de non –concurrence et des accords commerciaux régissant les relations entre une entreprise et ses partenaires.
- Favoriser l’accessibilité des données
La valorisation de l’information dans une logique de fournisseur de données nécessite de rendre ses dernières accessibles. En fonction du positionnement souhaité, une anonymisation des données ou une exposition des données proposées peut être mise en place.
La notion de fournisseur de données présuppose aujourd’hui un modèle économique à réinventer. Pour l’entreprise, choisir demain de mettre à disposition les données de ses clients nécessite pour cette dernière de se poser des questions cruciales par rapport à ses concurrents. Comment conserver son avantage concurrentiel tout en monétisant une partie de ses données ? Quant au client, est-il prêt à autoriser la collecte et la diffusion de ses données, pour une utilisation dépassant la réalisation du service auquel il a souscrit, et ce moyennant rétribution ? Peut-on imaginer, par exemple, qu’un public étudiant, accepte de fournir des informations quant à sa typologie d’études ou son projet professionnel en échange de la gratuité de certains services (mise à disposition de carte bancaire, assurance des moyens de paiement, etc.) ? Les modèles B2C, B2B, B2B2C existent. Et si demain voyait l’avènement d’un modèle B2C2B où le client accepte, moyennant finance, de mettre à disposition ses données à une communauté plus large ?