Comment rassurer et embarquer les acheteurs ? Comment responsabiliser les managers achats et fonctions supports ? Comment faire adhérer les clients/prescripteurs ? Comment accompagner les fournisseurs ?
Ces questions sont centrales dans toutes les transformations digitales achats et la capacité à adresser ces sujets aux bons moments est clé dans la réussite d’un projet.
Malheureusement, la réponse à ces questions est trop souvent la suivante : « c’est bon, j’ai mobilisé des formateurs sur l’outil, le sujet est couvert ».
Non ! Le sujet n’est pas couvert !
Former un acheteur sur un outil sans expliquer pourquoi cet outil a été mis en place est source de frustration ! Former un manager achat sans lui expliquer que cela va s’accompagner d’une évolution des gestes métiers pour ses équipes, ses prescripteurs et ses fournisseurs et ne pas le suivre dans cette transformation est un abandon ! Mettre le fournisseur ou le prescripteur face au fait accompli d’utiliser l’outil sans accompagnement rend très difficile l’appropriation.
Des actions simples, efficaces, qui semblent évidentes, mais régulièrement négligées et mises de côté
1) Du cadrage à l’ouverture aux utilisateurs
Il est important de pouvoir accompagner chaque phase du projet par une action de conduite du changement dédiée.
Le cadrage est l’occasion d’annoncer et diffuser les grands principes du projet de transformation en énonçant clairement les objectifs pour aligner les parties prenantes sur un horizon commun.
La conception est le moment :
- De définir et partager les nouveaux gestes métiers faisant évoluer la fonction achat pour les différentes populations (acheteurs, managers, clients/prescripteurs, fournisseurs)
- De planifier la phase de formation : un parcours complet permettant l’appropriation de l’outil pour les acheteurs, managers et clients ; des supports de formation et e-learning à destination des fournisseurs
A l’ouverture aux utilisateurs, le support utilisateur doit permettre d’accompagner et de traiter les tickets remontés par les utilisateurs internes (acheteurs, managers, clients/prescripteurs) et les fournisseurs
Au cours des premiers mois d’ouverture, le suivi de proximité des acheteurs, managers et clients/prescripteurs est indispensable :
- Collecter les retours : appropriation outil, ergonomie, suivi des nouveaux gestes métiers, interactions avec les clients/prescripteurs et fournisseurs
- Redescendre l’information : taux d’utilisation, nombre de dossiers/consultations/tickets, retours d’expérience, modes opératoires, etc.
2) Du choc à l’engagement
Ces grandes actions permettent d’adresser l’ensemble des phases d’acceptation du changement illustrées dans « le modèle Kübler-Ross ».
Le choc
Le changement annoncé par la présentation du projet est vécu de manière brutale par les parties prenantes. Il est important de prendre le temps de définir les messages et d’adapter la forme en fonction des populations, par exemple :
- Un séminaire destiné aux managers achats
- S’appuyer sur un réseau d’ambassadeurs pour diffuser l’annonce aux acheteurs et prescripteurs
- Préparer des communications institutionnelles pour informer et donner de la visibilité aux fournisseurs
- Créer et diffuser un kit de déploiement « pas à pas »
La communication effectuée lors de l’annonce doit permettre de diminuer la peur.
La remise en question
Après le choc de l’annonce, vient la phase de remise en question. Les populations concernées par le changement vont avoir parfois des réactions de rejet.
Les réactions classiques des utilisateurs d’une solution SI achat sont les suivantes :
- « Le processus achat est beaucoup plus long et complexe à réaliser dans l’outil »
- « L’expression du besoin dans la solution est fastidieuse, j’ai besoin d’appeler ou écrire à l’acheteur »
- « La validation et le suivi des dossiers de mes acheteurs au travers des workflows de l’outil n’est pas pratique pour moi »
Il est donc essentiel dans cette étape de clarifier précisément les évolutions des gestes métiers en étant le plus concret possible. La remise en question des populations concernées par le changement sera moins forte s’il est possible de se projeter concrètement dans un nouveau rôle, tout en comprenant les avantages individuels et collectifs de l’évolution des pratiques.
La remobilisation
Bien préparer et lancer suffisamment tôt la phase de formation permet de limiter les effets de la remise en question et d’accélérer la remobilisation. En prenant en main l’outil, les acheteurs et managers achats réalisent que les craintes et les résistances sont moins fondées, et qu’une issue positive est possible.
Souvent au cours de cette phase, les réactions vont être de plus en plus positives :
- « Finalement l’outil n’est pas si compliqué »
- « Je me rends compte que je peux interagir plus facilement avec les prescripteurs tout le long de la consultation »
- « La gestion de mes fournisseurs est plus transparente »
- « Les acheteurs de mon équipe ne sont pas si réfractaires, ils demandent même de pouvoir utiliser la solution plus rapidement »
L’engagement
Enfin, le succès final du déploiement réside dans la capacité à transformer la phase d’acceptation en engagement. De pouvoir passer du stade « l’outil n’est pas si mal, j’arrive quand même à faire une consultation » à « cet outil est un allié et me permet de mieux travailler, mes dossiers d’achats sont plus rapides, je réponds mieux aux besoins de mes clients/prescripteurs ».
Le suivi de proximité (aller à la rencontre des acheteurs, des managers et des clients/prescripteurs) et le support utilisateur (ne pas laisser un utilisateur seul face à un blocage outil) sont deux moyens très efficaces de susciter l’adhésion lors de cette phase.
Des acteurs pour impulser et animer
Ces actions, essentielles pour la réussite d’un projet ne peuvent exister que si elles sont initiées et incarnées, en particulier par le sponsor et l’équipe projet.
1) Le sponsor, une implication nécessaire mais non suffisante
Le sponsor est la clé de voute de la stratégie de conduite du changement :
- Il donne le sens et la direction. Il affiche clairement les objectifs, il fait le lien avec la stratégie de l’entreprise et donne de la légitimité au projet et à l’équipe en charge face aux parties prenantes internes et externes.
- Il choisit le chef de projet / l’équipe projet. Il prend en compte non seulement l’expertise métier et les compétences à mener un projet, mais surtout la capacité et la volonté de mettre en œuvre les actions d’accompagnement, de communication et de formation.
- Il diffuse une culture de conduite du changement à l’ensemble des phases du projet et en fait un élément clé d’évaluation du projet lors des comités de suivi via des indicateurs dédiés (nombres de questions récurrentes sur un même sujet, taux de satisfaction, taux d’utilisation, nombre de tickets).
2) Une équipe projet mobilisée avant tout sur la conduite du changement
Enfin, le rôle de l’équipe projet est de décliner opérationnellement sur chaque lots/volets du projet les actions de conduite du changement. L’équipe doit veiller au jour le jour à aligner les actions d’accompagnement aux phases projet (lancement, conception, recette, pilote, ouverture) mais aussi à la courbe d’acceptation du changement (choc, remise en question, remobilisation, engagement).