Le marché des drones a connu une croissance exponentielle dans plusieurs domaines. Les drones font aujourd’hui l’objet d’usages très variés. Dédié au loisir, au commerce et à l’industrie, il permet des captures d’image précises et constitue une vision augmentée sur le terrain.

Cependant, par sa capacité de pilotage à distance, d’emport d’une charge explosive, ou encore de brouillage de systèmes, le drone peut constituer une menace pour la population survolée, un lieu sensible et ainsi mettre en péril un système de sécurité qui protège les biens et les personnes. La paralysie de l’aéroport de Gatwick, le deuxième du Royaume-Uni, durant près de trente-six heures en décembre 2018, en raison de la suspicion de présence de drones, en est un des exemples les plus emblématiques.

Face à ce constat, les pouvoirs publics accompagnés par les acteurs privés du marché travaillent au développement et à l’encadrement réglementaire des solutions et des usages de la lutte anti-drone, coordonnée tant au niveau national qu’européen.

Ainsi, la lutte anti-drone désigne l’ensemble des actions visant à détecter, identifier et classer les drones dont l’usage légitime ou malveillant menace la sécurité nationale. À l’aube des grands événements sportifs à venir en France comme la Coupe du monde de Rugby 2023 ou les Jeux Olympiques en 2024, l’enjeu sécuritaire de la lutte anti-drone se pose plus que jamais et nécessite une anticipation et un encadrement. Wavestone, en tant qu’acteur de la transformation au profit de la Sécurité Intérieure, a développé une expertise et des convictions en matière de lutte anti-drone, à travers une vision à 360° des enjeux.

La lutte anti-drone est urgente et nécessaire

Au regard de la croissance exponentielle du trafic de drones 

Avec plus de 500 000 drones en France aujourd’hui, la croissance exponentielle de l’utilisation du drone civil s’accompagne d’une hausse massive de la menace inhérente à cette technologie.  

Faciles d’accès pour l’utilisateur, les drones sont devenus des outils privilégiés à moindre coût pour les organisations malveillantes en permettant une attaque à distance. Les drones civils peuvent être détournés en EEI – engins explosifs improvisés, en remplaçant et/ou en complétant la caméra par des charges explosives. De plus en plus de drones civils ont la capacité d’effectuer des vols autonomes permettant à l’assaillant de se trouver à plusieurs kilomètres de sa cible, ce qui rend d’autant plus difficile son interpellation.  

La perturbation de l’espace aérien et les risques d’accidents sont aussi croissants en Europe. En France, en 2017, 446 signalements de survols par drone1 de sites sensibles ont été déposés et une soixantaine de drones ont été neutralisés ces deux dernières années.

Le drone, une menace potentielle pour :

Au regard des enjeux de sécurité globale et des grands événements sportifs à venir  

L’évolution de l’écosystème technologique rend les missions de sécurité intérieure complexes. Perturbation du trafic aérien, observation de sites sensibles, emport de charges explosives ou de colis divers, il existe de nombreuses façons d’employer les drones de manière malveillante2. La menace terroriste, plus prégnante que jamais, est à l’origine du renforcement du dispositif de police du ciel depuis les années 2000 et les acteurs se mobilisent pour être en capacité de répondre à cette nouvelle menace.

La sécurité des sites rassemblant un grand nombre d’acteurs, mais aussi ceux dont la sensibilité est accrue, est remise en cause. L’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), estime que la résistance de ses installations est largement suffisante pour supporter la chute d’un appareil de la taille d’un petit drone3. Cependant, cette conviction peut être facilement remise en cause au regard d’une attaque simultanée de plusieurs drones armés (ex : essaims de drones).

L’approche d’événements sportifs de grande ampleur en France place la lutte anti-drone au cœur des enjeux de sécurité nationale La sécurité des stades et des lieux de compétitions pour les Jeux Olympiques de Paris doit être assurée tant au sol que dans le cielDévelopper des capacités de lutte anti-drone permet de répondre à la menace d’attaque isolée ainsi que de prévenir des risques relatifs à une attaque de masse dite par « saturation ». 

Zone interdiction drone

Désormais, il devient nécessaire d’assurer la coordination des agents du continuum de sécuritécomme l’indique le Rapport Fauvergue-Thourot4rédigé en 2018 qui détaille ces orientations. Inscrit dans le Livre blanc de la sécurité intérieure et dans les récentes discussions parlementaires, l’enjeu lié aux nouvelles menaces technologiques que représentent les drones répond à un contexte de crise permanente qui doit être appréhendé globalement et dont la réponse nécessite de penser autrement le « fait sécuritaire ».  

Face à ces enjeux, Wavestone a développé des convictions au service de l’accompagnement des acteurs de la sécurité intérieure

Construire un plan d’actions clair qui engage tous les acteurs de la sécurité 

Pour faire face aux multiples menaces en constante évolution et répondre aux enjeux sécuritaires des années à venir, une réponse globale ne peut se faire sans intégrer d’innovation technologique et de transformation organisationnelle. À l’échelle d’un événement, la lutte anti-drone doit faire l’objet d’une feuille de route précise pour coordonner les acteurs et les moyens technologiques, le tout dans un cadre réglementaire précis.  

Etablir un plan d'actions de lutte anti-drone

plan d'actions de lutte anti-drone

La réussite d’une politique de lutte anti-drone réside dans sa capacité à coordonner les différents acteurs du continuum de sécurité (Police, Gendarmerie, Polices Municipales, Sécurité Privée et les Armées). À titre d’exemple, si les polices municipales et les forces de l’ordre ont des missions communes, leurs domaines d’intervention restent différents et nécessitent de ce fait une très bonne coopération afin d’éviter toute confusion sur le terrain. Dans le cadre des grands événements sportifs à venir, les décideurs publics sont amenés à faire appel à des sociétés privées qui viennent complexifier le continuum de sécurité. Il faut alors que le recours à la sécurité privée s’inscrive dans un cadre clair et formalisé permettant notamment d’adresser les problématiques de lutte anti-drone, en coordination avec les missions des services nationaux ou locaux, afin de garantir la réussite de l’opération.

La menace doit donc être anticipée et pensée dans sa globalité avec l’ensemble des acteurs. Pour cela, la construction d’un plan d’actions coordonné doit se penser au regard des diverses utilisations qui sont faites d’un drone.

De fait, des procédures doivent être développées au sein des centres de commandements pour identifier clairement les actions à mener dans le cadre d’un système de lutte anti-drone : l’objectif étant de cadrer et former les opérateurs à anticiper, analyser et prévenir les risques.

Detecter Identifier Neutraliser Intercepter

Accompagner le déploiement technologique dans un cadre réglementaire précis 

Un manque de visibilité sur la réglementation, en constante évolution, rend difficile l’utilisation des drones notamment pour les forces de sécurité.

En France, la proposition de loi Fauvergue-Thourot5 permet une première réponse législative à ce sujet : le titre III est dédié à la vidéoprotection et la captation d’images par drones. Cette loi souhaite créer un régime juridique précis de captation d’images par moyens aéroportés et « prévoit d’autoriser les services de l’État concourant à la sécurité intérieure, à la défense nationale et aux forces de sécurité civile à filmer par voie aérienne pour des finalités précises, ce en fixant les garanties qui assurent le respect des libertés publiques. »

Bien que l’action des forces de sécurité se doit d’être conforme au cadre législatif, la règlementation ne peut en aucun cas constituer une réponse suffisante pour assurer la sécurité des citoyens vis-à-vis d’un usage détourné des drones. Un plan d’actions de lutte anti-drone doit donc prendre en charge cette composante tout en visant une couverture maximale des zones exposées.

En parallèle du cadre réglementaire, les solutions technologiques se multiplient et visent la neutralisation efficace des menaces. Une complémentarité entre outil fixe et solution embarquée permet de couvrir des zones larges, mais également de s’adapter au milieu urbain à la géographie spécifique. Une des difficultés majeures réside dans la capacité à détecter des drones en basse altitude et d’anticiper les attaques dites « saturantes ».

Le risque de chute est également important et doit être évalué lors de la phase de neutralisation. La rencontre entre l’Athletic Bilbao et Eibar,en mars 2021, interrompue par un drone au stade San Mames6, est symptomatique de ces difficultés et révèle des lacunes dans les dispositifs de sécurité actuels des stades.

Consciente de l’urgence de la situation, l’Agence de l’innovation de défense (AID) soutient, dans le cadre du projet d’accélération de l’innovation pour la lutte anti-drone, le développement de solutions technologiques et effectue des tests réguliers7 de leur efficacité dans une logique de « Test & Learn ».

Pour agir de manière efficace, les acteurs doivent avoir à leur disposition l’état de l’art des solutions actuelles disponibles sur le marché et pouvoir anticiper les évolutions futures.

Wavestone accompagne les entités publiques en cartographiant ces solutions et en proposant des benchmarks actualisés.

Répondre aux défis humains et organisationnels 

Face à des enjeux technologiques de taille, les agents doivent être formés sur les solutions de lutte anti-drone. Selon un rapport de la Cour des Comptes88, « un doublement des effectifs dédiés aux drones est attendu d’ici 2022 dans les armées ». Un véritable enjeu de formation se pose alors : il faut consolider les compétences techniques et juridiques des utilisateurs de drone, créer des filières spécialisées pour former et recruter des agents compétents et plus largement former l’ensemble des acteurs de la sécurité à l’utilisation des technologies : drones, objets connectés (IOT), intelligence artificielle (IA) etc. Même si ces initiatives sont déjà à l’œuvre : une prise de recul peut être intéressante afin d’établir un bilan et mettre en œuvre un plan d’action pour organiser les ressources humaines en conséquence.  

La gendarmerie nationale initié une stratégie solide de lutte anti-drone: en 2019, la création de la SPAD – Section de Protection et d’Appui Drones, a démontré toute son efficacité notamment lors des cérémonies du 75ème anniversaire du Débarquement. Des premières étapes clés ont été franchies avec cette unité dédiée mais la menace croissante exige une accélération et un renforcement des moyens humains notamment au regard des prochains Jeux Olympiques ou événements sportifs. 

La section utilise un détecteur de drone, un fusil et un pistolet permettant de brouiller les fréquences des drones inopinés venus survoler des manifestations publiques ou menacer la protection de personnes exposées. Les agents formés à l’usage des drones, disposent ainsi d’un socle solide pour développer une expertise de lutte contre les drones malveillants. Une connaissance des usages permet en effet une meilleure détection et une utilisation éclairée des solutions de lutte anti-drones 

La lutte anti-drone sera efficace si elle s’appuie sur ce socle solide de ressources humaines afin de garantir efficacité et réactivité. Pour cela, l’un des enjeux majeurs est de définir précisément la doctrine d’emploi des drones et de lutte anti-drone ainsi que le périmètre d’intervention de chaque acteur.  

Pour produire un continuum de sécurité du ciel, des agents issus de filières dédiées figurent en première ligne d’action. Des exercices de formation sur le terrain ainsi que des tests utilisant des solutions anti-drones en conditions réelles seront nécessaires à la bonne anticipation des événements de 2024. Les forces de sécurité de l’État doivent se coordonner avec les forces municipales, les agents de proximité, mais aussi les acteurs de la sécurité privée.  

Enfin l’enjeu de communication est également central : ces nouvelles formes de menaces et la nécessaire adaptation des forces de sécurité à celles-ci doivent être comprises du grand public et inscrites dans une démarche citoyenne plus large (responsabilité des usages, prévention…) afin que le sujet devienne l’affaire de tous.  

Au-delà des actions de communication et de formations, la conduite du changement, véritable expertise du cabinet, doit être considérée comme la colonne vertébrale de la réussite d’un plan de lutte anti-drone.  

Conclusion

Les drones sont de plus en plus présents dans notre quotidien et leurs usages se diversifient, des questions de sécurité intérieure émergent et doivent être pensées au regard des prochains grands rassemblements sportifs. 

La mise en place d’une politique de lutte anti-drone a pour objectif d’apporter des résultats tangibles en matière de sécurité et exige une transformation des processus idoines opérés par les acteurs publics.  

Les défis sont multiples et se situent tant sur les plans technologiques qu’organisationnel, que règlementaire.  

En réponse à ces défis, Wavestone accompagne les organisations dans le développement de plans de lutte anti-drone, depuis la stratégie à leur mise en place opérationnelle. Des compétences clefs du cabinet peuvent être mobilisées en matière de benchmark des solutions technologiques, d’outil d’aide à la décision pour les opérationnels, de cadrage de processus et d’élaboration de stratégie de déploiement 

À l’aune des grands événements sportifs qui arrivent en France, tels que la Coupe du monde de Rugby en 2023 ou les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en 2024, des transformations organisationnelles et technologiques sont déjà à l’œuvre et doivent se poursuivre et s’accélérer afin d’être au rendez-vous sur le volet sécuritaire grâce à une combinaison technologique et humaine de pointe.

Panorama des acteurs de la lutte anti-drone by Wavestone


1 Selon la Direction générale de l’aviation civile (DGAC).
2 Mission d’information sur l’action aérospatiale de l’État, 2019.
3 « La Chine dévoile un canon à drones kamikazes », Korii.slate, Céline Deluzarche.
4 Rapport de Mme Alice THOUROT et M. Jean-Michel FAUVERGUE, Députés – “D’un continuum de sécurité vers une sécurité globale”, Septembre 2018
5 Proposition de loi nº 3452 relative à la sécurité globale.
6 20/03/2021 : Rencontre dans le cadre de la 28e journée de Liga, interrompue à la 68e minute de jeu à cause d’un drone. Ce dernier a survolé la pelouse du stade San Mamés, avant de se poser sur le terrain. Il portait un message contre l’Euro 2020.
7 https://www.defense.gouv.fr/aid/actualites/helma-p-un-systeme-laser-pour-la-lutte-anti-drone
8 Rapport public annuel de la Cour des Comptes, « 4 – les drones militaires aériens, une rupture stratégique mal conduite », Février 2020.