Une étude France Digitale / Wavestone 2020
Peu de décideurs se sont aujourd’hui penchés sur les enjeux de souveraineté posés par l’informatique quantique. A commencer par la cybersécurité. Pour échanger de façon sûre sur un canal non sécurisé comme Internet, nos communications utilisent la cryptographie. Des technologies d’échange qui reposent majoritairement sur des clés aujourd’hui très complexes à décrypter, mais que les nouveaux algorithmes amenés par l’ordinateur quantique sauront demain potentiellement mettre à mal en moins de 8 heures.
Le quantum computing devient ainsi un défi majeur : il devient clé de se projeter dès à présent, et de protéger les données que nous échangeons à l’aide d’algorithmes de chiffrement post-quantiques. Les investissements seront lourds pour permettre les migrations techniques nécessaires : nous devrons changer les logiciels de tous nos ordinateurs et téléphones mobiles.
Gérôme Billois
Partner Wavestone
Le quantique peut aussi devenir une opportunité de premier plan pour sécuriser et pacifier le cyberespace, avec la création de réseaux d’échanges théoriquement inviolables. Ces opportunités, même lointaines et encore à l’état de travaux de recherche, peuvent changer la donne en matière de confiance numérique.
Dans la guerre sino-américaine, quelle est la place de l’Europe ?
Une course technologique internationale s’est enclenchée, d’où les Européens sont aujourd’hui absents. Quand la Chine investit 10 milliards de dollars à Hefei dans un centre de recherche de 37 hectares, quand les Etats-Unis lancent en 2018 le National Quantum Initiative Act prévoyant deux milliards de dollars d’investissement sur cinq ans, que fait l’Union européenne ? Notre “quantum flagship”, créé en 2018 avec un budget global théorique d’un milliard d’euros sur dix ans, vise à financer des projets de recherche internationaux mais aucun plan stratégique européen n’est encore mis en œuvre.
Un manque de coordination entre les pays et surtout un manque d’investissements ne permettent aujourd’hui pas de rivaliser. Il est temps que l’Europe s’invite dans cette compétition, en s’appuyant sur ses forces. Le continent héberge une recherche fondamentale d’élite et la création de plus de 80 startups quantiques.
Tour d’horizon des structures innovantes à l’intersection de l’informatique quantique et de la cybersécurité :
- l’ordinateur quantique pour briser les chiffrements (calcul quantique),
- la cryptographie quantique pour sécuriser les communications (distribution de clés quantique et le générateur de nombres aléatoires quantique),
- la protection contre la menace quantique (cryptographie post-quantique).
La France a une vraie place à prendre dans le virage du quantum
Pour que les défis de souveraineté soient relevés, un véritable un plan quantique européen doit être créé et se baser sur trois piliers.
- La collaboration entre Etats membres – notamment grâce à la création d’une organisation européenne de recherche quantique.
- La collaboration entre chercheurs, startups et industries européennes – portée notamment par la commande publique européenne.
- La transdisciplinarité des projets quantiques, incluant la cybersécurité mais également tous les autres usages.
Nicolas Brien
CEO France digitale
C’est aussi un appel aux grandes entreprises privées de prendre part à la recherche et développement en collaboration avec des laboratoires de recherche et des startups, et de participer au financement de ces dernières.
La France a un rôle moteur à jouer et plus particulièrement maintenant que le Royaume-Uni s’apprête à quitter l’Union européenne. Comme nous l’avions noté dans notre précédente étude, l’Hexagone accueille en Europe le plus de startups spécialisées en informatique quantique derrière le Royaume-Uni. Leader en recherche fondamentale, la France peut renforcer son jeu et ne pas rater ce virage technologique.
Cette publication a été réalisée en partenariat avec France Digitale